Divagation Sonore

de Marie-Christine Mazzola

Lecture musicale
Charmante Cie

 

Cette existence est un exil au sens le plus fort :
nous n’y sommes pas, nous y sommes ailleurs et jamais nous ne cesserons d’y être.
Maurice Blanchot, de Kafka à Kafka

 

L’exil désigne le « hors de chez soi », une forme de déracinement qui oblige au déplacement vers un ailleurs, à la migration passagère et parfois à l’errance sans fin. Il peut inspirer « le mal du pays », la nostalgie ou la mélancolie à l’endroit de la terre natale, de ses proches, de la langue maternelle et de tout un monde qu’on a laissé derrière soi en partant.

Il peut aussi engendrer une approche du monde singulière, devenir le lieu de croisements culturels féconds. Entre le moment du départ et celui du retour possible, la condition de l’exilé est souvent comme suspendue dans le temps, avec la difficulté de réinstaller un « chez soi » ailleurs. Le pays d’accueil n’est pas alors perçu comme un nouveau foyer, mais bien comme une terre d’exil dans l’attente et l’espérance d’un retour possible.

Il faut sûrement distinguer l’exil forcé par les circonstances politiques et économiques de l’exil volontaire de celui qui aspire à couper les ponts, à rompre avec ses appartenances passées pour changer de vie.

Enfin, l’exil comme métaphore de la condition humaine est un tourment qui traverse les cultures et les religions. Une grande part de la littérature du XXe siècle, qui fut celui des grands déplacements de populations, des mouvements massifs de migration dus aux guerres, aux révolutions, a été l’œuvre d’exilés : Kafka, Joyce, Beckett, Nabokov, Neruda, Garcia Marquez…

Que signifie donc la condition de l’exilé ? Comment vivre en transit, au croisement de plusieurs cultures ? Comment surmonter les déchirements, les humiliations de l’exil – quand le retour au pays natal devient improbable et que l’on ne connaîtra plus jamais le confort d’être quelque part « chez soi » ? Comment transformer la souffrance de l’éloignement du pays natal en source de création ?

N. S.-L.
Sources : https://www.cairn.info/revue-etudes-2010-2-page-233.htm

CRÉATION en 2022
au Parc du Souvenir (Chelles, 77) — lors du Festival par has’Art ! (4e édition)
les 9 et 10 juillet 2022

UNE FEMME

Nina,

Nous partons
La nouvelle est tombée sans appel
Depuis le cratère laissé par l’obus
Je sentais l’agitation perpétuelle à la maison

Ils sont venus nous tuer criait la mère
Ils violent nos femmes, ils tuent nos gens
Ils ne sont plus nos frères

Besoin de m’éloigner
Je sors

J’erre dans la ville déserte, les déchets, la poussière

La plupart des civils ont été évacués
Seuls les plus vulnérables restent
personnes isolées,
personnes âgées,
personnes handicapées
Fragiles, elles n’ont pas seulement besoin de soins
elles ont aussi besoin de soutien, de réconfort

[Pourvu qu’elles puissent vivre à nouveau sans se cacher]

Le bruit d’un flash me surprend, je sursaute
un deux trois cheeeeeese — prendre en photo chaque livraison
un deux trois cheeeeeese — prouver que l’aide humanitaire est bien distribuée

Tout s’use si vite, ici

Je tourne à gauche — j’arrive aux abords d’une place
en son centre un jeune garçon

Cela fait un mois qu’il partage notre quotidien
qu’il nous écoute
qu’il nous dessine
il rend hommage à nos morts et nous permet encore d’exister

Il n’est pas le seul à vouloir marquer la ville au fer rouge

Au fil des jours, les murs, les escaliers, les sols se colorent
Notre mémoire, nos revendications se dessinent
Fresques, mots, slogans
Autant de messages que nous souhaitons faire passer

mise en voix et en espace Marie-Christine Mazzola création sonore et musicale Gaël Ascal

Durée 40 min

Production La Charmante compagnie
Contact Marie-Christine Mazzola
Crédits photo Festival Par has’Art ! 2022 © Yann Piriou

Avec Claire Delaporte et Gaël Ascal

Soutien à la création
En coopération avec le Réseau des Conservatoires de Paris – Vallée de la Marne