LE CRI

Bruno Allain

Pourquoi crier ?
pour libérer sa peur, sa rage, son angoisse, son énergie, sa colère, son désespoir, son impuissance, son trop-plein… « La violence est ce qui ne parle pas » dit Gilles Deleuze… donc pour tenter d’évacuer cette violence-là… parfois pour faire partager sa joie, sa réussite, son amour…

Trop souvent les paroles entre adolescents se résument à des moqueries, insultes, invectives, critiques, provocations et ça dégénère. Le cri comme porte d’entrée pour aller plus loin, dépasser la violence verbale et physique, mettre des mots sur tout cela qui anime et bouillonne, nommer ce qui d’habitude est tu.

Le cri, c’est aussi la manifestation d’un engagement, il est la parole qui perce le silence dans l’espace publique. « Allier le pessimisme du constat à l’optimisme de la volonté » disait Gramsci. En ce sens, le cri est l’expression d’un espoir, d’un acte dans le but de changer le monde et de mieux vivre ensemble.

« Je suis écrivain, acteur et plasticien. Je travaille essentiellement sur le visage humain et en particulier sur le cri. Je peins ce que je nomme des « gueulards ». L’une des trois sculptures installée en permanence au parc Kellermann 13ème (commande de la Ville de Paris) s’intitule « Le Cri ». Je fabrique des « boîtes à cris », objets avec consigne qui incitent le public à crier dedans, amenant à la fois à se défouler à la fois à s’interroger sur ses propres débordements. Le cri est très présent dans mes écrits, par exemple dans des pièces telles « Assassinez-moi ! » (Ed. de l’Avant Scène) ou « Quand la viande parle » (Ed. Le Impressions Nouvelles). Enfin j’aime croiser les champs disciplinaires. Cf quelques éléments de mon travail en annexe. » Bruno Allain

Par le décalage qu’il propose, le thème du cri ouvre la porte à des déclinaisons en nombre, et ce dans l’ensemble des disciplines : ateliers d’écriture, travaux en arts plastiques mais aussi en technologie, en langue, en science…, approches du théâtre… L’exploration du cri dans toutes ses manifestations est l’objet artistique de la résidence. Il se fera en compagnie des enseignants selon les projets déjà définis ou selon d’autres à venir et qui s’imposeront. Il sera enfin le cœur de recherches en documentation (histoire de l’art, explorations de site…) ou d’enquêtes sur le territoire proche du lycée.

Du 7 au 25 janvier 2015, La Charmante Compagnie proposera un festival au théâtre de l’Opprimé à quelques encablures du lycée dont le thème est l’engagement citoyen et le désir d’agir. A cette occasion, « Tu trembles », pièce de Bruno Allain, fera l’objet de 15 représentations. Seront aussi organisés des lectures, des projections de films, des débats, des expositions… Le lycée dans son ensemble sera associé à ce temps fort.

Outre ce théâtre, le territoire comprend d’autres lieux culturels : galeries, librairies, espaces divers sous les arcades de l’avenue Daumesnil, la Maison des Ensembles (3-5 rue d’Aligre) qui dépend de la Ligue de l’Enseignement… également le CRTH, Centre de Ressource Théâtre Handicap, rue de Charenton, dans lequel Bruno Allain anime un atelier d’écriture théâtral et qui sera associé à la résidence, en particulier pour sensibiliser les élèves aux questions de sécurité… mais aussi des lieux de vie : depuis les cafés environnants, le Carrefour Market de la rue de Lyon (très fréquenté des élèves et qui devient pour eux un lieu de rencontre), le MacDo avenue Ledru Rollin, le Tabac au coin de la rue de Lyon, le gymnase de la ville de Paris 242 rue de Bercy, autre lieu de rencontre entre lycéens venant d’autres établissements… jusqu’à la Gare de Lyon. La stratégie en cours est de repérer ces lieux, d’entrer en contact avec ceux qui les animent, d’organiser des visites d’exposition par exemple selon la programmation des galeries ou de monter des lectures publiques (dialogue entre textes de l’artiste résident et ceux écrits par des élèves), ce qui est déjà acté au CRTH. La Gare de Lyon, lieu des départs (séparations) ou d’arrivées (retrouvailles), se prête étonnamment bien à l’observation et à l’enquête que mèneront des élèves sur le thème du cri.

« Lors de ma résidence au collège Utrillo, j’avais organisé avec un restaurateur proche du collège des « après-midi dégustation » pendant lesquels les élèves écrivaient des textes courts sur le goût. Le restaurateur en avait imprimés certains sur des marques-pages et les distribuait à ses clients en fin de repas avec la note. Ce sont des actions et un rayonnement de ce genre que je souhaite inventer avec le territoire proche. »

Bruno Allain

Résidence sur le territoire avec le soutien de la Direction régionale des Affaires culturelles d’Île-de-France – Ministère de la Culture, de l’Académie de Paris, d’Arcadi Île-de-France, de la Fondation du Crédit Mutuel en partenariat avec les Écrivains Associés du Théâtre et du lycée professionnel Chennevière-Malézieux (Paris 12e arr).